— 20 — la mort, qui * à toute heure il apprehendoit & luy aduint en punition de fon forfait. Les autres voyagent par neceffité comme un Abra ham & fon fils Ifaac pour euiter la famine, fortent de la terre de Chanaan, l’un pour aller en Egypte, & l’autre en la terre des Philiftins, car la famine & la neceffité eft une maraftre fi preffante & facheufe, qu’elle conduit les plus foibles au tombeau & con traint les plus robulles à de longs voyages pour trou- uer remede à leur neceffité. Les autres fortent de leur païs attirez par le profit & gain temporel, comme les Marchands qui courent d’un polie à l’autre, la mer & la terre, l’Orient & l’Occident, le Septentrion & le Midy, pour paruenir à leur defir infatiable d’amaffer richelfes. D’autres font portez d’un defir d’apprendre en voya geant, comme Epimenide Peintre, lequel partit de Rhodes, & s’en alla en Afie, la où il demeura long temps, puis s’en reuint à Rhodes, fans que iamais perfonne luy entendit dire aucune chofe de ce qu’il 3 auoit veu & fait en Afie, de quoy s’es || merueil- lant les Rhodiens, le prièrent qu’il leur voulfiit con ter quelque cas de ce qu’il auoit veu, aufquels il ref- pondit en telle forte : i’allay dix ans fur la mer pour me faciliter à patir, ie demeuray autre * dix ans en Afie pour apprendre à peindre, & fix autres eftudiay en Grece pour accoutumer à me taire, & partant n’ef- perez pas grand difcours de moy; ce qu’ayant dit il fe teut; & lailfa les autres dans leur bon appétit, ce qui me fait refouuenir de ce qui m’a efté dit depuis peu, que la Royne d’Efpagne à prefent régnante, ayant